L’égalité des chances
Selon le classement PISA* les écoles finlandaises sont celles où il y a le plus petit écart entre les notes de la personne la meilleure et celle de la plus faible (là où la France se classe première comme reproducteur des inégalités, cf article du monde cité ci-dessous). Les politiques éducatives en Finlande sont guidées par cette idée d’égalité des chances et cela reste leur objectif premier. Ainsi, les écoles jouissent d’une grande autonomie vis-à-vis du programme qu’ils adaptent à leurs élèves pour permettre qu’à seize ans ils aient à peu près tous le même niveau. Selon les écoles et les municipalités les classes n’ont pas à suivre exactement le même programme. L’école finlandaise pour les 7 à 16 ans (appelée « comprehensive school » dans la documentation en anglais) est organisée autour d’un tronc commun obligatoire sans sélection, filières ou classe de niveau. De plus il n’y a pas d’établissements privés, donc les élèves venant de tous les milieux socioéconomiques vont dans les mêmes écoles. L’école est d’ailleurs gratuite pour tous mais pas de la même manière qu’en France. En effet l’élève est entièrement pris en charge : matériel scolaire donné par l’école, cantine gratuite, transport assuré quand l’élève habite à plus de 5km, service de santé gratuit, aide psychologique pour le soutien des élèves etc. L’égalité des chances, c’est aussi l’égalité d’accès à l’éducation dans toute la Finlande. On compte environ 3 500 « comprehensive school » pour 600 000 élèves dans ce territoire très vaste où la densité de population peut être très faible.
Les professeurs s’occupent de chaque élève en particulier, ne laissant personne derrière et permettant donc à tous d’avoir le niveau nécessaire en fin d’année. Le redoublement n’existe pas, les professeurs vont plus lentement et s’adaptent à leurs élèves, quelles que soient leurs capacités et leur vitesse d’apprentissage.
Ce système est de plus très efficace, le classement PISA classe les élèves finlandais premiers dans de nombreuses matières (où la France arrive en moyenne dans les 20ème).
Cependant, la « critique » que l’on peut faire à cela est que l’éducation finlandaise ne permet pas de « tête de classe » poussée à aller plus loin dans leur raisonnement dans leurs études supérieures (après 16 ans donc). Le système élitiste français peut être critiqué pour maintes raisons mais l’on ne peut nier que les lycées très sélectifs comme Louis le Grand et Henri IV (pour citer les plus connus) forment des élèves au niveau bien supérieur, une espèce d’élite française qui, en dépit de ces justes critiques, a tout de même ses avantages. Il en va de même du système des classes préparatoires, très élitistes une fois de plus, mais dont les élèves brillants sortent avec des méthodes de travail importantes et une culture incomparables aux meilleurs élèves finlandais (après 16 ans encore une fois et dans un système qui laisse trop de personnes de côté en France). Cela est visible pour moi aussi à l’université finlandaise où les cours restent souvent assez superficiels et la progression lente. À force de s’assurer en permanence que tous les élèves suivent, comprennent, n’ont pas de question, le professeur aborde en 1h30 moins de sujets qu’il ne le ferait en France lors d’un cours magistral où les élèves se contentent d’écouter. Cela sans compter la plupart des professeurs qui, en Finlande, utilisent les 20 premières minutes du cours pour faire un résumé du cours précédent. Je prends ici pour exemple un cours appelé « communicating in the digital world » que j’ai eu deux heures par semaine durant deux mois. Les deux professeurs étaient très à notre écoute et le premier cours (dans son intégralité !) fût consacré à un résumé de ce que nous allions étudier, à nous montrer qu’il n’y avait rien de complexe à partir du moment où l’on participait et qu’il ne fallait pas avoir peur de dire s’il y avait quelque chose que l’on ne comprenait pas. Très bien dans l’idée mais cela ne nécessite pas deux heures et un powerpoint de 15 pages constitué de ce genre de slides :
Le système français n’est bien sûr pas le meilleur puisqu’il laisse beaucoup trop d’élèves ayant des difficultés sur le côté et ne laisse pas à tous les élèves la même chance de réussir. Il permet toutefois aux élèves qui arrivent à suivre d’aller plus loin dans leur réflexion et de ne pas s’ennuyer dans des cours où le niveau est tout de même assez faible en Finlande, quand en tout cas en ce qui concerne l’université.
Ce qui est à retenir ici quand même est que, pour ce qui est de leur comprehensive school, les Finlandais ont trouvé un système bien plus efficace et égalitaire que nos écoles primaires et nos collèges. Les élèves évoluent sans stress, avec des professeurs toujours à l’écoute qui s’occupent de chaque élève en particulier, leur permettant tous, quelles que soient leurs capacités, d’avoir le niveau attendu d’une personne de seize ans. Ils ont de plus tous les outils en main pour faire ensuite un choix personnel et réfléchi quant à la suite de leurs études et sont en général bien plus responsabilisés et conscients de ce qu’ils souhaitent faire plus tard que ne le sont nos élèves de seconde.
- PISA est un programme international pour le suivi des acquis des élèves, qui évalue régulièrement les performances des systèmes éducatifs des pays membres et associés. Les élèves évalués ont 15 ans.
- À lire :
- « le système éducatif finlandais : performance et équité » dans La Finlande : un modèle éducatif pour la France de Paul Robert.
- Et l’article du monde : « Classement PISA : la France championne des inégalités scolaires » http://www.lemonde.fr/ecole-primaire-et-secondaire/article/2013/12/03/classement-pisa-la-france-championne-des-inegalites-scolaires_3524389_1473688.html
Fanny
Vaasa, avril 2014